Cet article fut publié dans le SVB2017
Par Charlène Blais
Présidente du conseil d’administration
Ce n’est un secret pour personne : la science évolue extrêmement rapidement. Depuis la découverte du gène responsable de la fibrose kystique en 1989, nous avons connu de prodigieuses avancées médicales et plusieurs médicaments ont été mis sur le marché pour aider les personnes vivant avec la fibrose kystique.
Notons tout particulièrement l’apparition de médicaments aidant à la liquéfaction des sécrétions pulmonaires, comme le Pulmozyme™. Bien qu’approuvé par Santé Canada au milieu des années 1990, son coût élevé crée à l’époque un tollé, et le régime d’assurance médicaments du Québec refuse de le rembourser. Il aura fallu l’intervention de notre organisme, aidé de partenaires, pour que le gouvernement revoie finalement sa décision. Grâce à notre intervention, les personnes FK du Québec peuvent désormais bénéficier de ce traitement. Il y a une dizaine d’années, le salin hypertonique est venu s’ajouter à cette gamme de médicaments mucolytiques.
Ces dernières années, nous avons vu l’apparition d’antibiotiques de plus en plus efficaces pour nous aider à combattre les infections qui nous sont toujours dommageables. Cette nouvelle génération d’antibiotiques comprend entre autres l’aztréonam (mieux connu sous le nom de Cayston™), qui agit directement contre le Pseudomonas.
Les suites de la découverte du gène défectueux se sont fait attendre jusqu’à tout récemment. Des thérapies visant directement la génétique sont désormais envisageables. La compagnie pharmaceutique Vertex a d’abord mis au jour le Kalydeco™, premier traitement qui corrige le défaut génétique de la fibrose kystique chez les personnes ayant une mutation très spécifique (environ 2% des FK du Québec). Par la suite, l’Orkambi™, qui lui vise près de 50% des FK Québécois, fut approuvé par Santé Canada en janvier 2016.
Malgré cette approbation, l’Orkambi™ n’est malheureusement pas automatiquement remboursé par notre régime public d’assurance aux nombreuses personnes qui pourraient en bénéficier. En effet, l’organisme qui recommande à la RAMQ les médicaments qui seront couverts, l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), a statué en octobre dernier que les résultats préliminaires n’étaient pas assez concluants pour que le gouvernement du Québec rembourse ce traitement. Certains FK ont cependant la chance d’être couverts par une assurance privée qui en accepte le remboursement. Il s’agit toutefois d’une minorité de cas, les conditions de couverture n’étant pas les mêmes pour toutes les assurances[1].
Si nous comparons la couverture d’assurance ou même le système hospitalier du Québec avec celui des États-Unis, par exemple, nous pouvons nous considérer chanceux. Chez nos voisins du sud, la médiane de survie des gens vivant avec la FK est de 39 ans, contre 53 ans ici : la différence est énorme. Cet écart s’explique facilement lorsque l’on compare les deux types d’accessibilité aux soins. Là-bas, les couvertures médicales sont inégales et certaines personnes, une fois majeures, ne disposent d’aucune couverture (incluant les médicaments). Certains FK doivent parfois diminuer leurs doses de médicaments afin de pouvoir allonger leur prescription mensuelle, particulièrement dans le cas des enzymes et de l’insuline. Plus grave, dans plusieurs états, il n’est pas rare que des gens doivent cesser une médication ou ne puissent pas compléter une hospitalisation.
Nous avons donc la chance inouïe de bénéficier d’un système de protection important, d’être nés dans un pays qui met au cœur de ses priorités les aspects sociaux et la santé de sa population. Mais cette chance ne doit pas nous empêcher de décrier certaines des situations malheureuses que nous rencontrons : à quand l’égalité de tous les citoyens devant l’accès aux meilleurs traitements, indépendamment de leur couverture médicale, qu’elle soit privée ou publique? Si un médecin juge que son patient pourrait bénéficier d’un médicament qui a été approuvé, pourquoi ne serait-il pas couvert par le régime public d’assurance?
Ces questions d’importance demeurent au cœur de l’engagement de notre organisme envers vous.
[1] Selon nos données, entre 25 et 30% de nos membres ont une assurance privée.