En outre, vos successeurs ne seront pas nécessairement ceux à qui vous comptiez léguer votre patrimoine. En effet, le Code civil établit clairement l’ordre dans lequel la succession doit être répartie, selon que vous êtes marié(e) ou conjoint(e) de fait, que vous avez des enfants, que vous avez des frères et sœurs et que vos parents sont encore en vie. Mentionnons que si vous n’avez pas rédigé de testament et que vous et votre tendre moitié êtes conjoints de fait, votre conjoint(e) n’obtiendra rien, peu importe depuis combien d’années vous étiez ensemble.
Types de testament
Il existe trois formes de testament : le testament olographe, le testament contresigné par deux témoins et le testament notarié.
Le testament olographe est une solution de base. Il doit être entièrement rédigé et signé de votre main – donc, pas à l’aide d’un ordinateur ou d’une machine à écrire. Il ne coûte rien, peut être rédigé rapidement et constitue un document tout à fait légal; cependant, il devra être authentifié par le tribunal ou par un notaire après le décès, ce qui retarde le règlement de la succession et entraîne des coûts pour les héritiers.
Vous pouvez aussi rédiger votre testament à la main ou encore sur l’ordinateur ou sur une machine à écrire, énoncer vos dernières volontés, puis le faire signer par deux témoins majeurs et n’ayant aucun intérêt dans l’affaire. Il a la même valeur légale que le testament olographe.
Le testament notarié est authentique. Une copie est consignée chez le notaire, et la Chambre des notaires du Québec est obligatoirement avisée du nom du notaire qui a fait votre testament. Ainsi, si vos héritiers présentent une preuve de votre décès à la Chambre, il leur sera plus facile de retrouver votre testament.
Par comparaison, un testament olographe ou fait devant témoins, s’il n’est pas conservé dans un endroit sécuritaire, est plus susceptible d’être « égaré », détruit ou volé. En outre, un testament notarié est pratiquement incontestable, contrairement au testament olographe. Cependant, depuis l’entrée en vigueur de la Loi 443 en 1999, le notaire a désormais le pouvoir de vérifier l’authenticité d’un testament olographe ou contresigné par deux témoins. S’il n’y a pas d’opposition, il peut rendre ce testament exécutoire. Auparavant, seul le tribunal disposait de ce pouvoir.
Une fiducie pour les survivants
Établir votre testament vous donne également l’occasion de créer une fiducie à l’intention de vos héritiers. Cela permet notamment d’éviter l’ingérence du Curateur public du Québec dans vos affaires de famille. La création d’une fiducie vous permet de gérer, post-mortem en quelque sorte, les parts d’héritage de vos proches (conjoint(e) et enfant(s)) et d’assurer leur avenir financier, sur tous les plans. Par ailleurs, le fait de rédiger votre testament vous donne l’occasion de désigner le ou les tuteurs légaux de vos enfants mineurs, advenant votre décès et celui de l’autre parent.
Un liquidateur de succession
Pour éviter tout malentendu ou toute dissension au sein de la famille, on recommande de désigner, dans son testament, un liquidateur de succession. Cette personne sera alors investie de tous les pouvoirs de gestion du patrimoine; elle décidera s’il est préférable de vendre les biens ou de les conserver, et répartira les biens entre les héritiers. Combien d’histoires d’horreur avons‑nous entendues au sujet de familles déchirées par l’avidité et la cupidité après un héritage!
Mandat en cas d’inaptitude
Tant qu’à plonger dans le domaine juridique, pourquoi ne pas établir un mandat en cas d’inaptitude? On préfère ne pas songer à l’éventualité où l’on ne sera plus en mesure de gérer convenablement nos biens, soit à cause de la maladie, soit à cause d’un accident. Toutefois, il peut être utile de prévoir, au cas où… Le mandat d’inaptitude vous permet de désigner une ou deux personnes pour gérer vos biens et assurer votre bien‑être si vous deviez être déclaré inapte à prendre des décisions éclairées à ce sujet, évaluations médicale et psychosociale à l’appui.
Vous pouvez désigner un ou deux mandataires. Si vous en nommez deux, l’un peut être chargé d’assurer votre bien‑être (p. ex., les soins de santé), l’autre de gérer vos biens (p. ex., vos taxes, votre hypothèque, vos comptes bancaires). Vos mandataires sont des personnes en qui vous avez confiance, qui vous connaissent bien et savent comment vous gérez vos affaires.
Quand vous établissez un mandat en cas d’inaptitude, vous devez préciser la date de rédaction du mandat, indiquer votre nom au complet ainsi que celui du ou des mandataires, et définir clairement leurs responsabilités respectives. Le mandat doit comporter une déclaration datée et signée par deux témoins n’ayant aucun intérêt dans l’affaire.
Ici encore, il est préférable de rédiger votre mandat devant notaire, car cela simplifie la procédure le moment venu. Si le mandat n’est pas notarié, les membres de votre famille devront le faire homologuer par un greffier ou un juge de la Cour supérieure, ce qui entraîne des délais et des frais additionnels. Dans ce cas, ils doivent avoir en main une copie de l’évaluation médicale et psychosociale attestant votre inaptitude.
Un service à rendre à vos proches
En résumé, on recommande à tout un chacun, malade ou non, à risque ou non, de rédiger un testament, sous une forme ou une autre parmi celles qui ont été mentionnées ici. L’important est d’en rédiger un, point à la ligne. Cette mesure rendra un service inestimable à vos proches à un moment sans doute difficile et vous permettra de « partir » l’esprit tranquille, quoi qu’il arrive.
par Geneviève Thibault-Gosselin