Créateur de la fiction l’Air d’aller – diffusée sur Télé-Québec à partir du 23 mars 2023
Peux-tu nous parler de la fiction l’air d’aller ?
J’ai eu cette idée-là après avoir écrit « Ce qu’on respire sur Tatooine », je me suis dit que je n’avais pas totalement terminé d’aborder la maladie, je pense que je voulais encore exploiter certains sujets que je n’avais pas exploités dans le livre, qui est un livre ou le narrateur est seul et dans sa tête, un livre plutôt sombre ou il fait face à la pauvreté et est seul face à ça.
L’Air d’aller c’est différent, c’est 4 amis qui ont la fibrose kystique, c’est le dernier été d’une de leurs amis qui est en attente d’une greffe, et c’est inévitable, soit elle a sa greffe, soit elle meurt. Dis comme ça, ça à l’air dramatique, mais il y a beaucoup d’humour, je crois que je réussis, sans dédramatiser ce qu’est la fibrose kystique, à aborder la maladie dans une perspective que je connais. En me basant sur les quelques rôles que j’ai vus à la télévision de personnes qui ont la fibrose kystique, je trouvais que c’était assez grossier, caricatural, alors je voulais l’aborder à ma façon. Mais encore là, je n’ai pas la véritable solution, oui j’ai la fibrose kystique, mais probablement que d’autres FK vont regarder la série et ne vont pas s’identifier aux personnages, et c’est bien correct, car c’est une fiction, pas un documentaire. Je n’ai pas écrit cette fiction pour démocratiser la maladie, si certains spectateurs peuvent en apprendre plus en regardant, tant mieux, mais je l’ai écrit avant tout pour divertir, puis faire un bon show TV.
Au niveau des personnages il y a Jimmy, joué par Joakim Robillard, Cindy, jouée par Noémie Leduc-Vaudry, Catherine, jouée par Catherine Saint-Laurent, et Gabriel, joué par Antoine Olivier Pilon. Gabriel est tatoueur, et vraiment poche comme tatoueur, Jimmy travaille dans une crèmerie, Catherine est trop malade pour travailler, elle se promène avec une bombonne d’oxygène en tout temps, et Cindy elle s’occupe de son père mourant qui est plus malade qu’elle. La philosophie de ce show, c’est de montrer que les gens malades sont plus heureux que les gens en santé. En TV, habituellement, on place un malade pour mettre en avant avec plus d’importance ceux qui sont en santé, alors j’ai voulu aborder la maladie d’une façon plus originale et drôle, je pense avoir réussi, mais j’ai hâte d’avoir les échos de ceux qui vont regarder.
Est-ce que ça a été difficile de convaincre les diffuseurs ?
Non, j’ai vraiment été chanceux, j’ai proposé un projet et ça a fonctionné tout de suite avec Télé-Québec, et ils ont embarqué dans ma folie.
Comment s’est passé le choix des actrices et des acteurs ?
J’avais des idées, j’ai vu énormément d’audition. La réalisation a été super gentille et ouverte en m’incluant dans les auditions. Ce ne sont pas tous les réalisateurs ou réalisatrices qui demandent aux scénaristes ce qu’ils en pensent. Avec Sarah Pellerin, j’ai eu le luxe de pouvoir choisir avec elle les candidats.
Ils se sont vraiment révélés en audition, quand j’ai vu Catherine, Joakim, Antoine Olivier et Noémie, je me suis dit «oh my god, c’est tellement eux les personnages que j’avais en tête».
Quel a été ton niveau de participation dans l’écriture ?
Je suis le seul scénariste, c’est mon idée originale. Mais j’ai eu une équipe fantastique, Nathalie a été une script formidable, sans elle la série ne serait pas ce qu’elle est en ce moment. Moi c’est ma première série télé, évidemment il y a plus de restriction que dans la littérature. Je me suis fait dire « ah non désolé, on ne peut pas faire exploser une maison » ou des trucs du genre. Nathalie m’a beaucoup aidé à la scénarisation, et aussi Alexandre, mon producteur. On était un beau trio. Sans oublier Urbania, ce n’est pas tous les producteurs qui vont embarquer dans une folie un peu punk, avec des personnages assez bons vivants.
As-tu vu le résultat final ? Tu en penses quoi ?
Oui, vu les premiers rushs, et les premiers montages. Je n’ai pas vu le mix final par contre. Mais j’ai vu à quoi ça va ressembler, et je suis vraiment agréablement surpris. C’est une réalisation vivante, organique, avec caméra à l’épaule.
Il y a aussi un élément important dans le show, j’y ai inclus de la danse contemporaine, c’était un couteau à double tranchant, car je ne voulais pas que ça fasse comédie musicale genre «Grease», je voulais quelque chose de sensible, qui va avec le projet. Sarah et la chorégraphe ont réussi à faire quelque chose de fun et touchant. Quand tu as la fibrose kystique, tu peux te lever un matin et cracher du sang sans savoir ce qui se passe, et parfois il n’y a pas de mot pour comprendre cette incompréhension-là, alors je me suis demandé « comment je peux faire pour retransmettre cette émotion à l’écran ? » puis j’ai pensé à la danse, aux mouvements, à ce que ça peut invoquer. Je ne suis pas du tout un amateur de danse, mais j’ai eu cette idée-là. En littérature c’est plus facile, quand je ne sais pas comment exprimer quelque chose, je le fais avec des poèmes pour aller au cœur du sentiment. Mais en cinéma c’est différent. En image, la danse a été très utile. Parfois les personnages vivent des douleurs internes, et par le biais de la danse on comprend leurs douleurs, c’est assez magique. Les comédiens et comédiennes n’étaient pas des danseurs, mais ils ont été super bien coachés, ils ont fait quelque chose d’exceptionnel, j’ai été impressionné.
Je suis vraiment très satisfait, c’est une grosse équipe. J’ai énormément appris. Dans le milieu de la télé il y a beaucoup de personnes qui lisent ton scénario, tes textes, ils ont beaucoup de questions, et tous mettent les mains à la pâte. Tous s’approprient ton texte, le costumier, l’éclairagiste, le directeur photo, c’est un travail collectif. C’est fun et stimulant. Ce sont des gens hyper créatifs, doués, et c’est une jeune équipe, c’est une dynamique très galvanisant.
Est-ce voué à avoir une autre saison ?
Il pourrait y avoir des suites. Tout dépend de la réception du projet et d’éléments que je ne contrôle pas, mais j’ai assez de créativité pour faire une suite.
As-tu d’autres projets en cours ?
Je sors un recueil de poésie fin avril, pour les enfants qui ont des problèmes de dyslexie.
Je lance aussi un roman à l’automne, qui s’appelle «la blague du siècle », c’est une histoire familiale qui va suivre un gars qui s’intéresse à l’humour, mais qui vit une situation familiale particulière, car il a un frère schizophrène et son père a un cancer du cerveau, mais c’est un livre très drôle ! Mon pitch de vente c’est toujours ça, il y a un drame de fond, c’est noir, sombre, mais c’est drôle.
Aimerais-tu rajouter quelque chose ?
J’espère que tout le monde va aimer, surtout les FK, je le souhaite secrètement. On n’a tellement pas été bien représenté, que j’espère que ça deviendra une référence artistique sur la FK.
Une femme m’a écrit, récemment, elle m’a dit « j’ai la fibrose kystique, je n’aime pas parler de la fibrose kystique, je n’aime pas en entendre parler, mais avec ton livre j’étais contente de lire ça ». Si le livre a réussi à faire ça, j’espère que la série pourra réussir à aider certaines personnes à accepter la maladie, puis surtout juste rire et décrocher. Je ne voulais pas de personnages qui s’apitoient sur leur sort, si tu veux voir des malheurs, il y a juste à regarder les actualités. Je voulais, avec ce show, qu’on puisse rire, décrocher, que ce soit léger et agréable.